Cette séance sera présentée par Estelle Nabeyrat.
La revue britannique Afterall a récemment consacré un ouvrage dans sa collection Exhibition Histories series, élevant ainsi la XXIVe Biennale de São Paulo au panthéon des expositions historiques. Inaugurée en 1998, elle fut empreinte d'une forte position curatoriale car, jamais une exposition d'une telle envergure, n'avait été consacrée au sujet anthropophage. La 24ème biennale fut donc le principal déclencheur d'une importante mise en circulation du thème de l'anthropophagie.
Et avec elle, c'est toute une réflexion sur les principes mêmes qui fut entamée : appropriation, échange, distribution... à l'heure ou le curatorial s'accompagne d'une émergente évaluation de la curation comme système d'infiltration à d'autres modèles, une révision de la Biennale sur la culture anthropophage s'impose. Véritable entreprise de reformulation d'une histoire de l'art critiquée pour sa vision trop occidentalo-centrée, l'édition de cette biennale s'affirmait comme un modèle d'exposition inédit portant, dans cette perspective, le chantier en Amérique latine d'une réflexion sur le post-colonialisme.
Pour autant, le point de friction qui s'opère habituellement à l'intérieur de ces questions se traduisait en réalité ici par un point d'absorption. En quelques mots, la rhétorique post-coloniale se trouvait subtilement recalibrée pour mettre à l'ouvrage les notions d'échanges et pour rendre visibles les espaces de partages pouvant se dessiner dans la relation colonisateur-colonisé.